• Révolution des origines ?


    Selon la thèse jusqu'à présent enseignée dans toutes les écoles et devenue implacable idéologie, l'homme proviendrait uniquement d'Afrique puis aurait ensuite émigré vers l'Europe et l'Asie. Une étude américaine, parue lundi 2 avril, infirme cette vision réductrice. Les Annales de l'Académie nationale américaine des sciences (http://www.pnas.orgwww.pnas.org/) ont produit le résultat de ses recherches, et ils concluent qu'il n'y a pas eu qu'une seule migration d'Homo sapiens venu d'Afrique orientale vers l'Europe et l'Asie, pendant une période de 25 000 à 65 000 années, aboutissant à la substitution des humains autochtones primitifs. Ces scientifiques théorisent une propagation génétique de l'Homo sapiens à partir de plusieurs foyers, en Afrique et en Asie. Cette pluralité de souches invaliderait donc l'unicité de l'expansion originelle. "La plupart des caractéristiques morphologiques correspondent à celles des humains modernes, alors qu'une minorité de traits s'apparente davantage à des hommes plus primitifs", précise Hong Shang l'un des coauteurs de cette découverte. Les chercheurs soulignent que "des ossements légèrement plus jeunes et ayant le même mélange de caractéristiques morphologiques ont aussi été découverts en Eurasie orientale".



    Pour conforter leur thèse, ces paléoanthropologues s'appuient sur l'analyse du plus ancien squelette humain d'Eurasie jamais découvert. Découvert près de Pékin en 2003, dans la grotte de Tianyuan, à Zhoukoudian, il est constitué de trente-quatre fragments d'ossements. D'après les hypothèses des scientifiques, ce squelette daterait de 42 000 à 38 500 ans. Ces révélations infirment la théorie de la migration de l'homme moderne, ces ossements ouvrent des perspectives absolument novatrices aux chercheurs du monde entier tant sur le plan biologique qu'au niveau anthropologique. A plus longue échéance, cette étude pourra permettre de combler les gouffres qui émaillent la filiation entre les humains primitifs et les humains modernes en Eurasie orientale.



    Pour Yves Coppens, l'Afrique demeure le seul et unique berceau de l'humanité (même si ses travaux moins médiatisés sont nettement plus circonspects, allez comprendre...). Il y a 500 000 ans, selon lui, le genre Homo habilis se serait répandu partout, sauf en Amérique et en Australie. Une glaciation aurait alors isolé l'Europe, où l'espèce aurait évolué de façon indépendante en donnant l'homme de Neandertal.



    Il est également admis aveuglément que le prétendu berceau de l'humanité se situerait dans l'Est-africain, à l'Est du Rift, le long de la "corne" qui va du Kenya à l'Ethiopie. La découverte de Toumaï , au Tchad, invalide également cette localisation théorique, les chercheurs conformistes sont là aussi désavoués. Ne pas trouver d'animaux à 460 millions d'années ne démontre en rien qu'il n'y en pas eu ! Ne pas trouver de souches humaines antérieures ailleurs qu'en Afrique invitait à dire qu'il n'y en avait pas, c'est maintenant chose faite, mais il est envisageable d'en trouver ailleurs également, du jour au lendemain !

    La recherche scientifique s'élabore aussi sur la foi, j'entends l'hypothèse encore indémontrable, l'intuition qui ouvre d'éventuelles perspectives qui peuvent être ensuite confirmées par les faits, et sans cette ouverture théorique la science s'enferme dans des dogmes (qui souvent mutent en idéologies). On ne cherche que ce que l'on espère trouver. Il faut préserver la science de cette subjectivité rétrécissante. Le monogénisme est une hypothèse parmi d'autres, rien de plus. Stephen Jay Gould le paléontologue américain, envisage par exemple plusieurs apparitions de vie distinctes tout au long de l'histoire de la vie terrestre, donc la diversité des lignées. Il s'est également opposé à la vision adaptationniste primitive qu'il critique au profit du hasard dans l'évolution.


    Toutefois, si ces révélations se confirment dans le temps, elles posent des problèmes scientifiques nouveaux, car le polygénisme se concilie fort mal sur un plan théorique avec la très faible variablilité de l'ADN humain (0,1%) et avec l'interfécondité qui caractérisent fondamentalement l'espèce humaine. L'unicité biologique de celle-ci est établie, et le polygénisme ouvrirait une complexification accrue quant à ce processus final. Il n'y a donc encore rien de conclusif. La thèse du polygénisme accentue paradoxalement la nécessité d'envisager des métissages multiples durant cette période. La simultanéité de souches distinctes implique une "réunification" par métissage.
    Il est bien question de l' Homo sapiens et non de l'Homo erectus, dont l'apparition en Afrique est toujours d'actualité.

    Les implications philosophiques et éthiques de cette question sont importantes. Car le monogénisme présente dès son origine un arrière-fond métaphysique, à savoir l'unicité absolue du genre humain, thèse défendue par tous les monothéismes (qui en tirent le principe du couple humain primordial et du péché originel en option). Cette croyance, d'origine biblique, fait écho à la «nature humaine» ainsi qu'au caractère accidentel, voire imaginaire des différenciations ethniques originelles.

    Une vision du monde multicommunautariste, multiculturelle, pluriethnique et multipolaire pourrait retrouver une éventuelle légitimité ontologique tirée de ces découvertes. Le mondialisme s'appuyant lui sur une vision unilatérale et ethnocentrée du genre humain.

    Les dangers et volontés conflictuelles que l'on pourrait tirer de ces travaux sont multiples, notamment l'instrumentalisation au profit d'un darwinisme social, racial ou culturel.
    Ces recherches peuvent également favoriser les théories différentialistes qui impliquent la conception d'attitudes et de comportements émanant d'appartenances particulières et non universelles. Cette essentialisation des identités est déjà à l'oeuvre à travers le communautarisme, le régionalisme et l'ethnisme (doctrine selon laquelle l'identité ethnique est première dans l'ordre des modes d'identification d'un sujet).
    Un relativisme éthique et culturel se nourrit de cette vision pluraliste de l'humanité.
    Le droit et même parfois le devoir de différence sont susceptibles de déboucher sur le conflit de type xénophobe dans une application négative, mais peuvent aussi ouvrir sur des modèles multiculturalistes, impliquant des statuts et traitements différents en fonction des diverses appartenances identitaires.

    Si des communautés humaines autonomes ont au stade de l'homo sapiens existé, c'est une invitation à réévaluer absolument toute notre vision du politique qui en découle, une ouverture à plus de considération pour le principe de singularité, de différentiation et au final de diversité naturelle à rebours du processus d'uniformisation libérale et capitaliste en cours sur toute la surface du globe.

    L'hétérophobie (rejet de la différence en tant que telle) est mise à mal par ces révélations.
    La mixophobie également (phobie du métissage), la croyance en des lignées absolument pures étant depuis longtemps invalidée sur le plan anthropologique.

    Mais un certain universalisme étriqué ne sortirait pas indemne non plus, celui qui aspire à des valeurs, des normes culturelles et comportementales unifiées et unilatérales.
    L'idéal d'une civilisation transculturelle unique et radicale est mis aussi en cause par ce travail.
    En l'état actuel des connaissances, le mythe fondateur de l'apparition du genre humain demeure à construire à défaut d'une claire connaissance des conditions exactes de son avènement.
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