• La Chose

    Revu the Thing, version Carpenter. Une série B ? Z ? Un film métaphysique qui ne dit pas son nom. Station polaire 31, hiver 1982, un hélicoptère norvégien siglé LOKK fracture l'horizon, un tireur tente d'éliminer un chien-loup qui traverse la banquise comme une comète folle, jette des grenades en sa direction, en vain. Il se pose à proximité de la station. Le tireur fait exploser son propre véhicule volant. Fait face à l'équipe de confrères chercheurs venue l'accueillir. Ils le tuent. Munis d'extincteurs, ils s'approchent des décombres. Le chien les rejoint. « N'aie pas peur, n'aie pas peur » . « Il n'y a personne au bout de la ligne ». « Sommes-nous en guerre avec la Norvège ? »

    « Tu voulais que je te trouve l'oiseau rare ? »

    « Les conditions de vol ne sont pas réunies. » Quinze jerricans d'essence. « On aura plus de terre, on aura plus de ciel, plus de pilote. Vous y tenez à aider ces norvégiens ? Lisez les cartes. » Le chien est tapi sous le bureau. Le cuisinier prépare les repas en roller. La table de ping-pong est désertée. L'ombre approche. Ils veulent comprendre ce qui a poussé cet équipage a canarder un pauvre chien. Ce chien pas comme les autres. Pas vraiment du genre à ramener des balles de tennis ou des croquettes en présent. Ils découvrent la base carbonisée d'où provenait cet hélicoptère. Des restes mi-sanglants, mi-congelés de visages déformés, de corps disséqués, conglomérés, réassemblés. Atrocement fusionnés ? Restes d'essence. De bras épars. « Aidez-moi à trouver une pelle docteur. »

    Russel avance dans la station, ne quittant pas sa lampe-torche. L'Antartique et l'impassibilité d'un animal venu de nulle part.

    « Nous avons ramené ça, Dieu de Dieu ! » Doigts difformes, l'autopsie est réclamée, les vomissures refoulées, l'effarement partagé. Des visages crispés de souffrance qu'il faut détacher les uns des autres, des bouches qui s'ouvrent sur d'autres bouches, un magma de symbioses improbables qui suinte de toutes parts. Ni alcool, ni drogues dans le sang, coeurs, poumons, foies, intestins, tout ça paraît normal !

    Ils partent boire, fumer, jouer au billard, aux échecs électroniques, aux cartes, et surtout à la mort. Il serait temps de ramener le chien avec les autres, dans le chenil. Il s'y retrouve. Demeure figé, comme prêt à l'affrontement. La meute le scrute, effrayée et sur la défensive. Il est aux aguets quelques secondes puis sa tête implose, laissant place à une effusion de filaments, tentacules, jets visqueux et dédoublements de viscères, formant une sorte de mixte entre une tarentule géante aux allures bicéphales, un loup en option enserrant et se nourrissant de ses apparents frères de race canine. Il faut les abattre. La Chose s'échappe par le haut du chenil. Demeure son embryon avorté aux allures peu ragoûtantes qui se concluent par le feu. Lance-flamme, ciel clair et pur. On commence à dépecer les restes. On entrouvre et une sorte d'immense cavité vaginale déploie un assemblage de membranes interdépendantes. « Ceci n'est pas un chien, ceci est une imitation de chien. La Chose n'a pas terminé son travail d'imitation de nos chiens. »

    -« C'est-à-dire ? »

    -« Finir l'imitation de nos chiens. »

    -« Personne n'a pensé à le ramener au chenil avant ? »

    -« Il est resté peut-être une heure avec moi, peut-être plus ! Pourquoi tu me regardes comme ça ? »

    - « Ca va durer longtemps ce petit cinéma ? Ca ne nous apprendra pas grand chose, qu'est-ce que c'est que ça ? »

    Ils contemplent un film tourné par leurs confrères. L'équipe semble entourer une zone creuse correspondant à un atterrissage. Ils posent des charges thermiques. Ils cherchent quelque chose.La base est décortiquée comme un corps de Modigliani. Un immense rectangle incrusté dans la banquise. Ils ont tout appris aux Incas plaisante l'un des membres. Il est possible qu cette chose soit arrivée de l'espace. Intrusion, cellule de chien, assimilation, assimilation complète ,imitation de cellule de chien. Probabilités d'infection des membres de la station par l'intrus : 75%.

    Population mondiale infectée après 27 heures de contact.

    Un verre de whisky JB, il fait - 40 dehors.

    -« On devrait brûler cette saloperie ! »

    -« On ne brûle pas la découverte du siècle, elle nous vaudra le prix Nobel. »

    -« Les clefs ? Va demander à Gary, j'ai encore quelque chose à faire ici. »

    - « La chose a pu imiter des millions de formes sur des millions de planètes. Le caméléon agit au milieu de la nuit . »

    - « Ses restes vivent toujours. »

    Essence, fumigènes. Reculez maintenant.

    Chasse-neige. Brasier. La confiance ne règne pas ici, c'est plus facile de croire en Dieu.

    Ils sont coupés de tout. Ils ne sont plus ce qu'ils semblent être.

     

    Ils ne sont déjà plus que simulation d'humains. Un test sanguin, pour déterminer qui a pu y échapper. Comparer avec les lots de sang préservés... les lots ont été saccagés. "Est-ce qu'il aurait marché docteur ? Quelqu'un le savait ? Splendide !" Givre, sang. « La chose ne veut pas se montrer, elle veut se cacher à l'intérieur de nous, si elle nous envahit, elle n'aura plus d'ennemis, elle aura gagné. »

    Il n'y a plus rien à faire qu'à attendre.

    « Daniel Darc, la grande traversée.Entre deux ombres »

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